lundi 9 mai 2016

Jour 08 – Meilleure série publiée en ce moment ?

Entre toutes les infimes choses qui égayent mes lectures, je suis toujours très attiré par les petites romances qui traînent au milieu des histoires, quelles qu'elles soient. Néanmoins, ce sont toujours des récits annexes, des sous-quêtes totalement facultatives qui n'entravent en rien le rythme global de l'intrigue principale, et jamais je n'aurais cru sciemment aller chercher un livre DE romance. J'avais bien lu Cinquante nuances de Grey, "pour la science" et surtout pour comparer nos impressions avec une amie, mais on me l'avait mis entre les mains. De là à clairement rechercher la chose par moi-même, il y avait un gouffre.
Gouffre que j'ai allègrement franchi avec l'entrée du jour, Sunstone de Stjepan Sejic.



J'en ai d'abord vu une publicité à la fin d'une lecture random (je ne sais honnêtement plus quoi), la couverture était aguicheuse, les accroches complètement farfelues, et surtout, c'était Stjepan Sejic.
Sejic est, avec Ron Marz, l'homme qui a revitalisé Witchblade et la totalité du line-up Top Cow à la fin des années 2000, avec des intrigues croisées et un dessin tout-numérique absolument superbe, quoique très moyen narrativement parlant. Sejic a du style, mais manque clairement de qualités de conteur. Alors quand le garçon se lance tout seul dans la fiction SM lesbienne, il y a de quoi se poser des questions.
Honnêtement, je m'attendais à du soft-porn un brin graveleux, parfaitement inoffensif mais aussi et surtout totalement inutile. Une lecture bas de gamme, un Aphrodite IX avec du sexe à la place des bastons, un Fifty Shades of Lesbian à lire pour rigoler. J'avais tort.

Il faut dire que Sunstone a débuté en 2014 comme une blague, sur le net, sous forme de stips humoristiques. Sejic y développait une galerie de personnages "pour le fun" et, de son propre aveu, s'est finalement laissé prendre au jeu. Il leur a inventé des origines, des caractères, des buts, et s'est mis à mettre tout ça en images.
De fait, c'est composé comme un strip et ça se voit. Quoique je préfère largement son format relié publié chez Top Cow, la bédé se lit dans sa forme originale en longues bandes verticales sur le compte DeviantArt dédié du monsieur. Le découpage y est fort différent, les séquences publiée à des dates aléatoires offrant une gestion plus libre du rythme narratif et le format web permettant de longues et hautes compositions sans aucun regard pour le modèle d'impression. Heureusement, Sejic n'hésite pas à retoucher ses planches en fonction, mais la différence n'en reste pas moins palpable. En fait, lire les deux est presque recommandé si vous avez un minimum de curiosité pour les questions narratives : le découpage est vraiment très bien pensé, tant au niveau du scénario que des compositions même.
Autre chose de très prégnant, et beaucoup plus surprenant de la part d'un auteur dont ça a toujours été le gros point faible : le scenario à (très) longue durée. Chaque personnage a son parcours prédéfini, de nombreuses allusions à des évènements passés et à venir sont décelables, et l'effet secondaire tout à fait désirable d'une telle construction, c'est que la relecture d'anciens chapitres devient vite, au delà même de l'excellente histoire qu'on re(rererere)lit juste parce qu'elle est bonne, une chasse à l'élément manqué. Cet univers à mi chemin entre rose bonbon et rouge démon a une vie.


Au delà de ça, il est très intéressant de noter que, quoique le sujet soit à la mode, Sejic ne tire en vérité aucun réel avantage de la relation lesbo-sado-maso de ses héroïnes. Certes, le roman reste très graphique (on parle d'un gars qui a bossé six ans sur Witchblade et Aphrodite IX, quand même), mais la nature de la relation est très vite relayée au rang d'accessoire, expliquée de la manière la plus naturelle qui soit par la narratrice. La vraie raison d'être de cette bande dessinée, c'est ses personnages, et leur relation. Tout court. Un will they/won't they classique de comédie romantique, avec un twist de cuir et de latex.
Sunstone est singulièrement honnête, simplissimement direct, maladroitement drôle et d'une franchise aussi embarrassante qu'attachante. Pour les curieux, j'ai été retrouver cette preview du tome 3 qui illustre parfaitement la chose.

Concluons : "Je suis venu pour le sexe", et je suis resté pour la romance, les personnages, l'humour, et tout le reste. C'est tristement, drôlatiquement et surtout totalement vrai, et j'attends très sérieusement le tome 5, qui devrait sortir cet automne, en me retenant de rafraîchir la page DeviantArt du monsieur trois fois pas jour. Lisez Sunstone. Franchement.

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